DOMINGO

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A quoi ressemblaient les familles brésiliennes bourgeoises? Felipe Barbosa et Clara Linhart s’invitent dans l’une d’entre elles le jour où ils fêtent un Nouvel an un peu particulier : le 1er janvier 2003 fut aussi le jour de l’investiture de Lula, leader issu de la classe ouvrière et désormais président du pays.

Domingo raconte à la fois un espoir, celui d’un Brésil revenant à un régime plus démocratique que le précédent et un désespoir, celui donc d’une famille bien-née craignant la fin de ses privilèges. La fête est pour le moins amère, plus encore quand Barbosa et Linhart filment la réunion de trois générations, de celle, conservatrice, des grands parents à celle plus ouverte au changement, des petits-enfants.

Quinze ans après l’arrivée au pouvoir de Lula, Domingo a évidemment un goût de satire quand la charge politique de départ se fond dans un regard qu’aurait apprécié le Bunuel du Charme discret de la bourgeoisie ou L’ange exterminateur, le film de Barbosa et Linhart tissant un fil de jeu de massacre autour de marivaudages et révélations d’adultères pour que tombe le masque et la façade d’un classe  sociale s’agrippant tant qu’ils le peuvent à leur monde.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LA CIENAGA (Une autre observation sociologique de famille bourgeoise, argentine cette fois-ci) ou encore CASA GRANDE (Trois ans avant Domingo, Felipe Barbosa radiographiait déjà le conflit de classes sociales au Brésil.).

Clara Linhart, la coréalisatrice de Domingo a connu comme une phase préparatoire à ce qui allait se passer au Brésil avec l’ascension puis la chute de Lula. En 1981, elle vivait en France, lorsque Mitterrand, et donc la gauche accédèrent au pouvoir, provoquant à la fois l’effroi dans les grandes familles nanties et une ouverture pour les classes prolétaires. Avant donc de constater, après des premiers temps euphoriques, que la révolution sociale n’aura pas lieu.

Vingt-deux ans plus tard, c’était donc au tour du Brésil de croire au grand soir, avec la victoire de Lula dans les urnes. Linhart et Felipe Barbosa n’auront pourtant découvert le scénario de Domingo, rédigé par Lucas Paraizo qu’au moment de sa destitution. Il avait été écrit en 2005 mais restait bloqué depuis plus d’une décennie dans les tiroirs d’un milieu du cinéma brésilien encore pétri de réflexes de protection acquis pendant les années de dictature militaire. Peut-être parce qu’il était des plus féroces, des plus sombres. Le tandem de réalisateurs ont d’ailleurs demandé à Paraizo de modifier sa fin, plus optimiste.

En revanche, ils ont tenu à conserver la région, au Sud du Brésil, à la frontière de l’Uruguay où se déroulait le scénario, forte de la symbolique qu’ils voulaient pour le film : c’est dans cette partie du pays ou l’esclavage fut  longtemps le plus répandu, où les traditions des grandes familles ont perduré. De quoi donner plus de sens et de force à la séquence où une domestique coupe l’électricité, allégorie claire d’une envie de soulèvement. La sortie en salles de Domingo  en octobre 2018, au moment ou Jaïr Bolsonaro était sur le point d’être élu président, indiquant un retour de bâton politique et social au Brésil, pousse le film a être plus inquiet qu’ironique sur le futur du pays...

Voilà une satyre très intéressante de l'upper class brésilienne, filmée à un moment clé de l'histoire de ce pays: l'investiture de Lula au poste de président en 2002. Outre cette vision politique qui prend pour appui la distinction entre les maîtres qui constituent cette ...