GRÂCE À DIEU

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Virevoltant d’un genre à l’autre depuis le milieu des années 90, François Ozon a prouvé son savoir-faire dans le domaine de la comédie (Potiche, 8 femmes) comme du drame intime (Franz, Le temps qui reste). Mais avec Grâce à Dieu en 2018, c’est la première fois qu’il s’empare de faits réels récents, et même directement en prise avec l’actualité : le scandale lié à des actes de pédophilie dans le diocèse de Lyon, et le combat d’une association de victimes pour obtenir justice.

Le titre fait ainsi directement référence aux propos du Cardinal Barbarin qui s’était félicité lors d’une conférence de presse que les faits reprochés au prêtre Bernard Preynat étaient prescrits, “grâce à Dieu”.

Pensé comme un documentaire (le réalisateur avait au départ pensé choisir ce format), le film est mené tambour battant, enquête passionnante et minutieuse qui expose au grand jour les faits, et surtout donne la parole aux victimes. Des actes en eux-mêmes, on ne voit rien, si ce n’est les conséquences indélébiles, parfois plusieurs dizaines d’années plus tard.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver THE MAGDALENE SISTERS (Dans son 2e long métrage, Peter Mullan raconte un autre scandale lié à l'Eglise, celui des "Magdalene homes", des formes de couvents où étaient enfermées et exploitées les femmes rejetées par leur famille et accusées d'être des "filles perdues".) ou encore LES CHATOUILLES (Sur le thème de la pédophilie, Andréa Bescond raconte sa propre histoire, celle d'une petite fille de huit ans confrontée à un ami de la famille qui lui propose de "jouer aux chatouilles".).

Tourné dans le plus grand secret, le 18e long métrage de François Ozon s’inscrit au moment de sa présentation à Berlin, en février 2019, dans une actualité plus que brûlante, puisque le cardinal Barbarin et Régine Maire, psychologue au service du diocèse, attendent le verdict du procès dans lequel ils sont accusés d'avoir couvert les agissements du prêtre pédophile, et alors que le principal accusé, lui, n'a toujours pas été jugé. C’est un hasard de calendrier, le procès du père Preynat ayant sans cesse été reporté.

Une action en justice est même intentée contre le film, cherchant à en repousser la sortie prévue le 20 février 2019, au titre que les trois “accusés” apparaissent sous leurs véritables noms, au contraire des victimes. Malgré tout, la justice tranchera en faveur du film, considéré comme une œuvre de fiction qui ne porte pas atteinte à la présomption d’innocence. Grâce à Dieu connaît alors une sortie médiatisée lui permettant de flirter avec le million de spectateurs.

Pour écrire le film, François Ozon s’est appuyé sur les témoignages des victimes, qu’il a rencontrées, et sur les verbatims des propos effectivement prononcés dans le cadre judiciaire. Cela lui permet de proposer un récit extrêmement documenté, qui reconstitue avec justesse les échanges épistolaires entre le premier homme à avoir porté plainte et les différents représentants de l’Eglise, mais aussi les circonstances ayant présidé à la création de l’association “la parole libérée” qui réunit les victimes du Père Preynat. Ce faisant, François Ozon trouve la bonne distance pour donner la parole aux victimes sans céder aux sirènes du sensationnalisme ou du mélodrame.

Il faut bien admettre que la majorité des oeuvres d'Art importantes le sont parce que leur créateur a nettement "pris parti". Loin de la tiédeur et du consensus. Le plus gros malentendu à propos de "Grâce à Dieu" - film par ailleurs vu et célébré (mais peu aimé) - vient ...

Sujet on ne peut plus brûlant, sorti conjointement au sommet historique sur la pédophilie dans l’Eglise, Grâce à Dieu prend, sur le plan cinématographique, un certain nombre de risques. Parce qu’il traite d’une affaire en cours, sans le recul généralement imposé par ...

Une étincelle, rien qu'une petite étincelle mal éteinte avec le temps, peut se réveiller. Le petit foyer est alors susceptible de prendre une extension aussi subite qu'inattendue car ce feu traumatise des personnes à tel point que d'atroces souvenirs restent gravés ...