L'ENFER DES ANGES (VERSION RESTAURÉE)

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Dans sa longue et grande carrière prolifique qui compte de grandes oeuvres comme Les disparus de Saint Agil, Fanfan la Tulipe ou La Tulipe noire, le cinéaste Christian-Jaque a sorti en 1941 L’enfer des anges qu’il avait tourné en 1939 mais qui, en raison de la guerre, a été reporté pour sa sortie.

L’histoire s’intéresse à Lucien, amnésique qui, après avoir été abandonné par son père, alcoolique et remarié avec une véritable mégère, rencontre la jeune Lucette, qui le réconforte. Livrés à eux-mêmes, les deux adolescents vont de mésaventure en mésaventure dans le Paris d'avant-guerre. Dans les rues glauques et mal famées, ils croisent nombre de personnages misérables.

Le film a eu le droit à deux fins mais une seule a vu le jour sur grand écran. Le film agit à l’époque comme un grand cri du coeur de la part du cinéaste pour alerter sur la détresse de l’enfance abandonnée dans un Paris contemporain à la sortie de L’enfer des anges. Au casting, on retrouve quelques grands noms tels que Marcel Mouloudji et Bernard Blier.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver CAPHARNAÜM DE NADINE LABAKI (On quitte cette photographie des années 1930 pour aborder un sujet similaire en plein XXIe siècle) ou encore LES DISPARUS DE SAINT-AGIL DE CHRISTIAN-JAQUE (Les deux films du même auteur traitent de l'enfance mais sont opposés dans leur manière de l'aborder).

Christian-Jacque est l’un des cinéastes français les plus prolifiques. En 45 ans de carrière, de 1932 à 1977, il réalise près de 60 longs métrages et travaille sur une soixantaine de téléfilms. Si son nom n’est pas le plus célèbre des réalisateurs de cette période, l’un de ses films, La Tulipe Noire, est le film le plus diffusé à la télévision française. Quand il réalise L’enfer des anges en 1939, il a déjà fortement marqué les esprits en 1938 avec Les disparus de Saint-Agil. Et ce nouveau long métrage arrive presque comme un négatif du précédent. Ce dernier était considéré comme une chronique autour de l’insouciance de l’enfance nourrie par les dialogues de Jacques Prévert, tandis que L’enfer des anges brosse un portrait poignant des gamins de banlieue confrontés à la misère et à l’indifférence du monde.

Ce projet de film est né de la stupéfaction qu'éprouva Christian-Jaque lors de sa découverte de la zone de Saint-Ouen. Inspiré des enquêtes d'Alexis Danan, journaliste et important défenseur des droits de l'enfant, le récit en conserve la dimension militante et dénonce, davantage encore que la misère, le déterminisme social qui retire à ces habitants marginalisés tout espoir d'amélioration de leur sort. En ça, le film de Christian-Jacque s’avère particulièrement contemporain dans sa capacité à observer les mécanismes de la violence sociale qui engendre la violence physique.

Comportant les mêmes jeunes acteurs que Les disparus de Saint-Agil, le même scénariste Pierre Véry et faisant appel aux dialoguistes Jacques Prévert, non crédité ici, L’enfer des anges s’avère pourtant moins connu que son prédécesseur. Il est pourtant l’un des derniers films du réalisme poétique français, courant cinématographique français qui a dominé la production française des 1930 à 1940 porté par quelques grandes figures comme Jean Vigo, René Clair ou Marcel Carné. A noter que le film faisait partie de la sélection française pour la création du Festival de Cannes en 1939, annulé en raison du début de la Seconde Guerre Mondiale et fut ensuite censuré par le gouvernement Daladier car soupçonné d'idéologie communiste.