MMXX en VOD
- De
- 2023
- 161 mn
- Drame
- Roumanie
- Tous publics
- VO - HD
PARCE QUE
Il n'aura pas fallu attendre longtemps pour que le Covid devienne un sujet de cinéma. Cristi Puiu, l'un des chefs de file du renouveau du cinéma roumain était sans doute l'un des réalisateurs les plus prédestinés à l'aborder : ses films (La mort de Dante Lazarescu, Sierranevada, Aurora...) explorent l'enfermement moral et mental d'un pays. Le confinement général imposé par le virus ne pouvait être qu'un terrain idéal pour revisiter ce thème.
Avec MMXX, nouvel état des lieux d'une Roumanie post-Ceausescu, Puiu fragmente donc l'impact du Covid en quatre segments, éparpillés au gré des quartiers d'une même ville mais réunissant un panel de population (une psy, des infirmiers, des policiers, des mafieux ou une citoyenne lambda) pour mieux appuyer la vision acerbe d'une société qui reste criblée de névroses personnelles ou collectives, jusqu'à conforter l'idée que l’épidémie en cours n'est rien face au virus d'une corruption morale ou financière. MMXX a l'humeur et l'humour grinçants.
Comme la plupart de ses congénères cinéastes roumains, Puiu utilise le rapport au temps comme un outil narratif. Les quatre récits de MMXX se répondent – dans le propos- sans être, ou quasiment pas (quelques personnages communs font le lien) connectés entre eux ; c'est leur rythme lancinant qui devient un fil rouge tout en tension. Que ce soit dans des salles d'hôpital, dans un hôtel particulier ou un appartement banal, toutes les situations semblent au bord de la rupture ou d'une crise de nerfs, si la mise en scène variable selon les parties -pouvant passer du statisme aux tremblements d'une caméra à l'épaule, du huis clos à des scènes en extérieur- la durée des séquences renforçant une sensation de cocotte-minute sur le point d'exploser.
En amenant ses quatre parties, tenant chacune du journal intime de personnages, vers un cahier vers un cahier de doléances plus collectif, MMXX nourrit un fascinant processus de psychanalyse des nouvelles angoisses roumaines, sa fausse froideur, dans une veine à la Michael Haneke (dont Puiu partage aussi, la maîtrise formelle) laissant sourdre de réelles inquiétudes pour un avenir où l'espèce humaine pourrait se résumer à des animaux tournant en cage. Sous ses airs de constat cruel, MMXX cherche avec eux des clés pour l'ouvrir sur des horizons plus cléments.