OR NOIR

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Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher à Jean-Jacques Annaud: c’est le manque de diversité des sujets que son cinéma aura abordé...Pour Or noir, le cinéaste nous offre à la fois un voyage dans le temps et l’espace...Direction les années 30, quelque part en Arabie, au cœur d’un sultanat que la rivalité entre deux émirs et la découverte du pétrole vont mettre sens dessus-dessous ...Une histoire de chair et de sable qui suit le destin d’un jeune prince, enlevé à son père par un rival, élevé dans l'amour des livres mais qui va devoir se transformer en guerrier afin d’unir les tribus du désert.

Annaud brasse ici les thèmes du savoir, de la religion, de l’amour et du pouvoir sous la forme d’une fresque qui n’est pas sans rappeler d’immenses classiques comme Lawrence d’Arabie. La force du réalisateur est de convoquer ces références tout en imprimant sa propre marque, celle qui façonne son cinéma. Ampleur de la mise en scène et des décors, grandeur des sentiments, direction d’acteur à l’unisson : voilà un cinéma d’artisan, généreux et simple, renforcé par un casting inédit et solide : Tahar Rahim, Antonio Banderas, Mark Strong ou la sublime Freida Pinto.

Préparez-vous au voyage : les dunes millénaires de l’Afrique du Nord n’attendent plus que vous...

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LAWRENCE D'ARABIE (L'immensité du désert, sa puissance hypnotique seulement troublés par la folie et l'ambition des hommes. David Lean comme Jean-Jacques Annaud ont le don de transformer un décor aride en un théâtre fascinant...) ou encore THERE WILL BE BLOOD (On imagine mal aujourd'hui combien le pétrole a radicalement changé l'histoire. Que ce soit en Arabie dans les années 30 ou au fin fond de la Californie à la fin du 19e siècle, le brut bouleverse les consciences et déboulonne toutes les certitudes...).

Il y a parfois des films qui rencontrent l’histoire... Or noir a été en grande partie tourné en Tunisie, au moment où le printemps arabe renversait la dictature de Ben Ali...L’équipe a vécu en direct la libération d’un peuple et ce souffle-là, à l’instar du sirocco, traverse le film de Jean-Jacques Annaud. Tahar Rahim, le prince Auda, quittait à la nuit tombée le confort douillet de son hôtel pour aller au contact de la jeunesse révolutionnaire tunisienne. Impossible ensuite que cela ne transparaisse pas dans son jeu, d’autant qu’il devait incarner un garçon en plein changement: un lettré qui devient chef de guerre...

Depuis ses débuts en 1976 avec La victoire en chantant, Annaud n’a jamais cessé d’explorer tous les genres du 7e art: la préhistoire avec La guerre du feu, le Moyen-âge avec Le nom de la rose, l’Asie coloniale avec L’amant , la guerre avec Stalingrad ou le monde animal avec L’ours...  Des films apparemment différents mais qui ont tous un point commun: la transformation inéluctable de leur héros principal. A chaque fois, il doit devenir ce qu’il n’était pas destiné à être au départ.
Une phase de mutation que le réalisateur à lui-même connu à plusieurs reprises: d’abord avec sa découverte de l’Afrique lors de son service militaire en coopération, une décennie ensuite passée au service du film publicitaire, puis le passage à la réalisation. Une carrière et une vie riches en rebondissements, marquées par un Oscar, des César, une entrée à l’Académie des beaux-arts, d’immenses succès publics et des échecs aussi. Or noir à sa sortie en salles n’a d’ailleurs par rencontré le succès escompté, le public étant peut-être en demande aujourd’hui de superproductions aux effets spéciaux plus voyants.

Jean-Jacques Annaud  lui ne déviera pas de sa route, attaché à sa profonde conviction que ce cinéma-là fait partie d’un patrimoine bien trop important pour être bradé...