BLOODTHIRSTY

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Tout commence, dans Bloodthirsty, avec un écran noir et du bruit. Celui, de plus en plus perceptible, d’os qui craquent, de chair qui se déchire, de dents qui arrachent la viande. Tout l’intérêt du film est ainsi résumé dans cette ouverture : la terreur peut naître de peu, sans image, et en laissant l’imaginaire travailler avec un son. De fait, le long métrage d’Amelia Moses, réalisatrice canadienne, fait dans l’économie de moyens et la suggestion. En imaginant l’histoire d’une jeune chanteuse en perte d’inspiration, qui s’enferme dans le manoir d’un producteur réputé pour travailler mais réalise bientôt que son véganisme est mis à rude épreuve par une envie dévorante de sang, la cinéaste reprend à son compte la figure du loup-garou. Mais lui donne corps par des moyens détournés.

Victime d’hallucinations, Grey, l’héroïne, se voit chasser des lapins dans la neige et leur tordre le cou. Mais, et c’est là que Bloodthirsty se distingue, on l’entend toujours plus qu’on ne la voit. La quasi intégralité du film se passe de prothèses et d’effets de maquillage encombrants pour suggérer un coup de griffes ou de dents. Et de la même façon, la naissance du monstre se traduit plus dans l’humeur de Grey que sur son visage. Amelia Moses n’est jamais aussi efficace que lorsqu’elle emprunte ces chemins de traverse lui permettant de renouveler quelque peu un genre ultra-balisé.

Le motif du lycanthrope permet par ailleurs à la cinéaste de parler de la pression de l’industrie musicale – qui s’obstine à demander à Grey quand elle épousera son petit ami alors qu’elle est lesbienne – et de la quête assoiffée de gloire. Bloodthirsty a d’ailleurs été co-scénarisé par une chanteuse, la Canadienne Lowell, qui signe également la chanson-titre du film. Une jolie ballade douce et angoissante à la fois, à l’image de l’actrice principale, Lauren Beatty (déjà vue dans le premier long métrage d’Amelia Moses, Bleed with me), très convaincante en artiste à la recherche de son identité intime et musicale.