MARIAGE À L'ITALIENNE en VOD
- De
- 1964
- 99 mn
- Comédie
- France | Italie
- Tous publics
- VM - HD
PARCE QUE
Vingt ans d’amour non assumé, ça éloigne. Mais selon Vittorio de Sica, ça peut aussi rapprocher. Après Hier, aujourd’hui et demain, le cinéaste mise de nouveau sur le couple Sophia Lauren - Marcello Mastroianni. Et peu de scènes d’introduction peuvent se targuer de dire autant de choses de leurs personnages et de leur époque avec une si petite poignée d’éléments. C’est sur un ton macabre que débute le long-métrage, alors que Filumena semble aux portes de la mort. Lorsque la caméra retrouve Domenico, l’humour prend le dessus : le personnage de Sophia Lauren serait vraisemblablement en train de jouer la comédie, et n’en est pas son coup d’essai. Mais derrière ses airs d’homme détaché, le commerçant napolitain est en réalité très inquiet. Il tombe, comme le spectateur, dans le piège de son amante, qu’il épouse pour lui accorder sa dernière volonté. Par amour ou par crédulité ?
Une fois la supercherie révélée par l’intéressée, c’est une spirale de coups de théâtre qui commence. Filumena et Domenico enchaînent les actes malveillants par vengeance, égoïsme ou altruisme. Les scènes absurdes répondent aux séquences dramatiques : de Sica change régulièrement de ton pour parler de ce couple qui n’en est pas vraiment un, de ces énergumènes trop fiers pour pleinement s’aimer. Le jeu dans le jeu proposé par Sophia Lauren n’est qu’un infime aperçu de l’impressionnante palette déployée par la comédienne. Mais derrière cette simple histoire matrimoniale, le cinéaste dépeint une société fracturée, trop attachée aux conventions sociales pour laisser ses membres s’épanouir — personnellement, sexuellement, passionnément. Sous ses airs de comédie classique, Mariage à l’italienne cache le portrait d’un pays qui n’a cessé de caricaturer les femmes.
Se déroulant sur plus de vingt ans, le film témoigne de la stagnation des idées patriarcales dans la société italienne du milieu du 20ème siècle. Au début du long-métrage, Filumena est une princesse à sauver. Elle devient ensuite une prostituée méprisée, puis une mégère mal-aimée. De Sica part de la farce pour plonger dans une noirceur profonde, fouillant les tréfonds de l’âme humaine pour en dévoiler les côtés les plus sombres. Les protagonistes sont pathétiques, malaimables, égoïstes… mais on ne peut plus attachants. Parce que leur imperfection favorise l’identification, et que ces personnages ambigus servent un discours moderne sur l’émancipation féminine. Au cœur d’une société qui ne laisse de place qu’au paraître, Filumena et Domenico — malgré lui — sont un message d’optimisme. Cette histoire d’amour baignée dans le mensonge est loin d’être aussi désespérée que son introduction pourrait laisser paraître. Face à la révolution industrielle de la ville de Naples, Vittorio de Sica appelle à la révolution des mœurs.