TROIS FRÈRES

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Une triste occasion peut aussi être la bonne… Je m'explique : prenez le cas de Rocco, Raffaele et Nicholas dont vous allez faire la connaissance. Trois frères, obligés de se retrouver dans leur maison de famille du sud de l'Italie, après le décès de leur mère.

Obligés, car ces trois frangins ne partagent plus grand-chose de la complicité de l'enfance. L'un est magistrat, l'autre instituteur et le dernier ouvrier. Milieux, destins et préoccupations différents, le trio a fait du chemin mais selon des routes divergentes. Francesco Rosi nous avait habitués à des fresques politiques et sociales qui dénoncent les tourments de l'époque. Il signe avec Trois frères une ode familiale tendre et désabusée sur l'obligation de se retrouver malgré les querelles ou les douleurs du passé.

Une fois encore, il touche juste, grâce à une mise en scène fluide et un casting formidable dans lequel vous reconnaitrez Philippe Noiret, Michele Placido, Vittorio Mezzogiorno ou Charles Vanel…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver RUE MANDAR (La disparition d'un proche est une tragédie bien compliquée quand elle vous oblige à renouer avec des frères ou soeurs que vous vouliez oublier !) ou encore LES MARMOTTES (Deuil ou vacances, les réunions de famille peuvent être douloureuses ou drôles... Elie Chouraqui comme Francesco Rosi en fait brillamment la démonstration...).

On ne se refait pas ! Malgré le choix affiché de suivre une fratrie réunie par le deuil, Francesco Rosi n'a pu s'empêcher de truffer son film des thèmes fondateurs de son cinéma. Ce n'est ainsi pas un hasard évidemment si ses Trois frères travaillent dans la magistrature, l'éducation et le monde ouvrier. Au-delà de la famille, c'est sur la société transalpine que le metteur en scène continue de jeter un regard lucide et sans concessions… Terrorisme, pauvreté des campagnes ou difficulté de transmettre un savoir, les deux jours passés dans le petit village du Sud est surtout l'occasion de dire des choses sur un pays qui, au début des années 80, portait déjà en lui les germes du mal qui a bien failli l'emporter au plus dur de la crise du début du 21e siècle…

Mais, reste le socle de base du récit : cette famille tellement attachante et énervante ! Rosi fait encore la preuve de son immense talent de directeur et de choix des comédiens. Il n'est pas surprenant d'y retrouver Philippe Noiret. Ce pilier du cinéma français a également fait une brillante carrière chez nos voisins italiens. On se souvient évidemment de ses bouleversantes prestations dans La grande bouffe de Marco Ferreri en 1973, La famille d'Ettore Scola en 1987 ou Cinema paradiso de Giuseppe Tornatore en 1988... Mais Francesco Rosi a également fait appel à son immense talent et à sa voix de ténor. Dans Trois frères que vous venez de voir mais aussi dans Oublier Palerme, l'un de ses autres films marquants en 1989.

Et que dire de la performance de Charles Vanel, dans le rôle de Donato, le patriarche de la tribu. Des années 30 à la fin des années 80, le comédien a marqué son époque par son talent et sa présence à l'écran, dans le muet comme dans le parlant. La liste de sa filmographie a de quoi donner le tournis mais si l'on doit en isoler quelques pièce maîtresses, on peut citer : Les croix de bois, Les pirates du rail, Les misérables, Le salaire de la peur, Les diaboliques et même La main au collet d'Alfred Hitchcock !