PARIS AU MOIS D'AOUT en VOD
- De
- 1966
- 98 mn
- Comédie
- France
- Tous publics
- VF - HD
PARCE QUE
Rares sont les chanteurs qui ont réussi à être aussi convaincants sur scène que devant une caméra. Indéniablement, Charles Aznavour aura été de ceux-là. Et Paris au mois d’août, film réalisé en 1966 par Pierre Granier-Deferre, en est une preuve discrètement éclatante. L’auteur de La Bohême y est d’autant plus génial qu’il donne de l’épaisseur à un personnage qui n’en a que très peu au départ. Henri Plantain, marié, père de famille et vendeur à la samaritaine, ressemble à son patronyme : homme sans histoire et sans éclat, à l’existence banale, qui ne sait pas où se trouvent les poêles dans sa propre cuisine. En plein mois d’août, alors que femme et enfants sont partis en vacances et que lui doit rester travailler, il rencontre un mirage. Patricia Seagrave est mannequin, britannique, joyeuse et belle.
Au mois d’août, Paris est une parenthèse, que Pierre Granier-Deferre ouvre aussi pour ses deux protagonistes. La ville se vide aussi vite qu’eux s’emplissent de sentiments déferlants, sachant pertinemment qu’un jour le reste du monde reviendra et qu’il faudra se quitter. Avec une fin écrite d’avance, les amoureux se libèrent. Puisque tout s’arrêtera bientôt, il faut s’aimer rapidement, totalement, passer vite sur les petits mensonges et les petites trahisons accumulées pour embellir l’histoire (et, bientôt, les souvenirs).
La force du film réside d’abord dans ses interprètes, vifs et charmants, cette façon qu’a Charles Aznavour de rendre la naïveté adorable. Mais Paris au mois d’août est aussi porté par d’excellents dialogues, plein d’humour, signés du journaliste Henri Jeanson. Sa plume parfois perfide, sollicitée des années 1930 à la fin des années 1960 par Henri Verneuil, Marcel Carné ou René Clément, se fait ici espiègle et tendre, apportant au long métrage une poésie sincère.
Mais il faut aussi reconnaître à Pierre Granier-Deferre un sens certain de la mise en scène et de l’utilisation des décors naturels. Le personnage principal de son film est bien Paris, ses esplanades comme ses rues tortueuses, dans lesquelles il s’amuse à organiser des chassés-croisés romantiques, plantant ses amants dans des échafaudages, de part et d’autres d’une barrière ou derrière les vitres d’un aéroport. Sa maîtrise atteint son apogée lors d’une scène d’amour charnelle étonnante pour l’époque, où la montée du plaisir est figurée par la danse de doigts sur la peau, et la jouissance simplement par un visage de trois-quart dos, dont on aperçoit tout juste la langue venir caresser les lèvres. La séquence, aussi pudique que puissamment érotique, s’achève dans un sourire et un murmure, « c’est pas mal, hein ? », aux airs d’euphémisme triomphant.